L'HOMME ET SON CHIEN
BP 50044
28131 PIERRES CEDEX
TEL 06 77 31 50 90
Nous sommes le samedi 25 juin 2011. Ma vie va changer, mais je ne le sais pas encore.
Je suis dans l'Orne, je suis partie sortir un chien d'une fourrière d'où j'ai sauvé beaucoup de pauvres chiens. Je déteste cette fourrière, les autres aussi d'ailleurs... Ce sont les anciens abattoirs de la ville et rien n'a été fait pour accueillir les chiens, rien. C'est morbide.
Je suis sur la route quand mon portable sonne. C'est une copine, Jocelyne, qui me demande si je peux prendre un chiot qu'elle vient de tirer des griffes de son tortionnaire, je lui dis oui. Rendez-vous est pris pour le soir, vers 21h30, après son travail ; elle me l'amènera.
21h30, je sors dans la rue. Le fourgon de Jocelyne stoppe devant chez moi, son fils Thomas, à la place du passager, tient un petit chien noir dans ses bras. Je le saisis par la vitre baissée et je rentre à la maison. Je le pose sur la pelouse. Il titube, on dirait qu'il est drogué. Il est complètement paumé, hébété... Jocelyne m'a dit qu'il était battu et que son maître alcoolique le forçait, quotidiennement, à boire de l'alcool... C'est effarant ce que les humains peuvent faire aux animaux....
Le lendemain, dimanche, il va mieux déjà, il se jette sur les gamelles que je lui donne. Comment vais-je l'appeler ? Une amie me suggère Basile. Je n'aime pas trop ce nom mais... ça va changer....
Je décide de l'amener dès le lundi chez le véto pour lui faire faire un bilan sanguin. Je ne connais pas son âge, environ 3 mois, le véto confirme, nous décidons de lui attribuer le 25 mars 2011 comme date de naissance. L'avenir me montrera que nous ne nous étions pratiquement pas trompés : Basile est né le 28 mars 2011. Le bilan sanguin est très mauvais : le taux d'urée est, déjà, dans la zone rouge.
Basile est un petit chiot et il est insuffisant rénal !!!
Je ne connais pas cette maladie. Aucun de mes chiens, par le passé, n'a eu de problèmes aux reins. Je décide de garder Basile, pour lequel je suis tombée en amour, et de le soigner le mieux possible. Ce qui, a posteriori, n'a pas été totalement le cas, car je suis tombée sur des vétérinaires prenant les choses très à la légère et faisant, parfois, n'importe quoi. Comme je regrette de ne pas avoir rencontré plus tôt mon vétérinaire actuel... je suis sûre que Basile aurait pu vivre quelques mois de plus... éternel regret...
N'appréciant pas toujours le comportement des vétos de la clinique où je fais soigner les chiens de L'Homme et son Chien, je décide d'aller à la clinique Frégis à Arcueil rencontrer des spécialistes.
Basile subit tout un tas d'examens : bilans sanguin, échographies, radios. Nous prenons rendez-vous avec une nutritionniste. Le régime est crucial pour un insuffisant rénal. Je suis à la lettre tous les conseils que l'on me donne. Tout se passe bien. Basile a une vie normale au milieu de ma petite meute. Il est très proche de moi et moi de Lui. Un lien indéfectible nous lie. C'est comme si il ne pouvait pas vivre sans moi et moi sans Lui. Dès que tout le monde a mangé, je vais m'installer devant mon ordinateur. Basile aussi. Il y a en fait deux chaises accolées devant l'ordinateur : une pour moi, l'autre pour Lui. Je m'assois sur le bord de la chaise, de cette façon, Basile peut s'allonger sur la petite couverture étalée sur les deux chaises et c'est ainsi après chaque repas. La nuit, il dort contre moi. C'est mon Doudou, je n'en ai jamais eu petite... c'est mon premier Doudou. Comme pour les petits enfants, il m'est indispensable !
Ainsi va la vie... l'épée de Damoclès au-dessus de la tête.... Les vétos m'ont annoncé, certains avec un sourire aux lèvres (sans commentaire...) : il va vivre entre 1 et 2 ans, oui, un an et demi... Je ne veux pas y croire, je refuse de croire l'inacceptable.
Basile est en pleine forme, il est beau, musclé. Un beau chien de 25 kg, plein de fougue, toujours prêt à jouer avec ses copains : Nina, Ziva et Garou, Garou son pote de toujours. Il est très gentil, coquin, espiègle, il me nargue parfois, pour jouer, pour m'énerver un peu, ça l'amuse... moi aussi.
Basile accueille toujours avec bienveillance les chiens qui viennent ici en famille d'accueil, le temps de trouver des adoptants. Qu'ils soient jeunes ou âgés, femelles ou mâles, Basile ne fait aucune différence, il est gentil avec tous. Il participe à L'Homme et son Chien du mieux qu'il peut ! Il joue avec nos petits « invités», il ne les lâche pas comme s'il était leur nounou, c'est incroyable. Il est l'ambassadeur de L'Homme et son Chien ! Mais, il revient toujours sur la chaise à mes côtés après les repas faire sa petite sieste.
Basile adore regarder les vidéos que je prends où ils sont tous en mouvement. Un jour, je préparais les photos d'une Labrador sable, Basile a mis ses deux pattes avant sur le bureau et a tendu une patte vers elle, son museau sur l'écran, il devait la trouver à son goût, c'était un chouette moment.
Basile adore aussi m'accompagner en promenade.
Il s'assoit sur le siège passager à côté de moi et, là, fier comme Artaban, il regarde le paysage, n'en perd pas une miette. Parfois, il croise mon regard... Je n'oublierai jamais ces instants de pur bonheur partagés.
Autre chose très caractéristique de Basile : les avions. Basile regarde passer tous les avions, très haut dans le ciel. Il les suit du regard, jusqu'à ce qu'ils disparaissent. Ce comportement, réitéré à chaque bruit ou pas d'un avion, haut dans le ciel, qui survole notre jardin, m'a toujours questionnée.
Tous les chiens de L'Homme et son Chien sont stérilisés. Une association de Protection Animale se doit de prôner la stérilisation. Il y a trop de chiens, trop de chats. Ce surnombre est synonyme d'abandons, de maltraitance et, aussi, de mort.
J'ai donc fait castrer Basile, avant son premier anniversaire, comme les autres, car le passage ici d'autres chiens et, même, la présence de Garou et de Bambino, pouvaient poser des problèmes de dominance. C'était déjà un peu le cas, Basile étant le chef de meute, et je pensais que cela pouvait éviter bien des déboires... Plus tard, j'ai regretté d'avoir fait subir cette intervention chirurgicale à Basile mais les vétérinaires ne voyaient pas en quoi cela pouvait poser le moindre problème. Je l'ai donc fait. Ça ne s'est pas très bien passé... Basile a eu une inflammation... et la piqûre d'anti-inflammatoire lui a provoqué un abcès... cela n'a rien à voir avec sa maladie, c'est juste que « l'anti-inflammatoire utilisé provoque couramment ce genre de réaction», m'annoncé le véto, en me disant : « je ne vais plus l'utiliser ». Sans commentaire... une fois encore.
Ce que je n'ai pas dit, jusque-là, c'est que Basile a peur des vétérinaires, parfois une peur panique. Au début, il se terrait dans un coin de la pièce et tremblait de tout son corps. Les trois premiers mois de sa vie ont dû être terribles...
Une des vétos de la clinique ne l'aime pas, juste parce qu'il a peur et, elle, a peur de lui. Un jour, elle l'a pratiquement maltraité. Nous avons eu une altercation. Un comportement comme celui-là de la part d'un vétérinaire est inadmissible. Heureusement, depuis, j'ai quitté cette clinique et j'ai, enfin, trouvé un super vétérinaire. Quel dommage, quel regret que Basile n'en ait pas bénéficié plus tôt...
En dehors de cette castration malheureuse. Nous avons dû faire face à la toux du chenil, apportée je ne sais comment à la maison. Je pense que c'est un des chiens qui l'a ramenée de chez le vétérinaire. Ça a été très dur, la toux du chenil, très, très dur. Un médicament pour la toux, totalement inutile d'ailleurs selon mon nouveau vétérinaire, ne réussit pas du tout à Basile, c'est catastrophique ! Heureusement que j'ai pris sur moi de l'arrêter tout de suite, Basile a failli en mourir...
En dehors de cet épisode douloureux, nous devons affronter une autre grosse galère, encore venue de chez le vétérinaire : la teigne ! Ils ont rasé Basile avec une tondeuse pas désinfectée. Une tondeuse avec laquelle ils ont, préalablement, rasé un chien atteint de la teigne !!!
Basile attrape donc la teigne et pratiquement tous les autres aussi. C'est une immense galère pour moi et... pour Eux ! Quotidiennement, je les frotte avec un gant de toilette imbibé d'Immavéral. La galère dure 6 mois ! Six mois de désinfection quotidienne des sols de la maison, des draps sur leurs matelas. Je ne souhaite cette galère à personne et plus jamais à moi, je l'espère.
Début novembre 2012, les choses se gâtent. Basile, qui d'habitude mange sa gamelle avec bon appétit, n'en mange plus que la moitié, de plus en plus péniblement. Je fonce faire une prise de sang chez le véto. Elle est catastrophique : le taux d'urée a explosé, la machine ne peut même pas le mesurer ! Il faut mettre Basile sous perfusion pendant 48 heures, pour lui « nettoyer » les reins qui ne fonctionnent presque plus. C'est la panique totale. Je suis désespérée. Je me renseigne et je fonce à Trappes où il y a une clinique ouverte 24h/24 et pas trop loin de chez moi. J'emmène Basile, il ne va pas bien. Il est tout mou. Je vois un véto qui m'annonce qu'il est fichu ! Il me renvoie chez moi où Basile est supposé « mourir tranquillement »... J'appelle mon véto qui me dit qu'il est vital de le mettre sous perfusion. Je retourne à la clinique de Trappes. Je demande à voir un autre véto. Il place aussitôt Basile sous perfusion, on a perdu plusieurs heures... C'est sidérant ! Sidérant, d'avoir à faire à de tels vétérinaires qui peuvent, à tout moment, tuer les êtres qui nous sont si chers par leur incompétence ou leur je m'en-foutisme ? Il est 23h00, je laisse Basile qui pleure et aboie dans sa cage avec sa perfusion, c'est horrible de devoir le laisser comme ça dans le sous-sol de cette clinique. Horrible. Je n'oublierai jamais.
Je reviens le lendemain, je n'ai pas dormi, je n'ai pensé qu'à lui. J'ai essayé de le soutenir par transmission de pensée. Je ne veux pas qu'il meure, je veux qu'il s'accroche à la vie, à la sienne, à la mienne. Une assistante me l'amène, je le vois au bout de la laisse. Il va mieux. Il a un cathéter dans sa patte avant. Il me regarde, il est content. Il a droit à une sortie avec moi. On va faire un tour dans le quartier. C'est moche, ces abords de Nationale 10, très moche. Il fait gris et humide, un temps d'automne. Basile a l'air d'aller pas trop mal. Dehors, le vent s'est levé, le ciel s'est couvert, il fait un peu froid. Nous nous installons à l'arrière de mon monospace. Basile adore SA voiture. Je lui parle beaucoup. Je lui dis combien il me manque, que la maison, sans lui, c'est nul, que l'air qu'on y respire n'est plus le même et que je compte sur lui pour reprendre des forces et revenir au plus vite. Il m'écoute, il me regarde avec son beau regard profond, il me rassure. Je le ramène à l'infirmière, il la suit, docile. Il ne se retourne même pas. Quel courage, quelle volonté ! Il a compris qu'il devait se soigner pour sortir au plus vite.
Je suis gonflée à bloc sur le chemin du retour, crevée mais confiante. Je lui fais confiance, il va tenir le coup. On va réussir. Le lendemain, j'ai rendez-vous avec un spécialiste, pour assister à l'échographie des reins de Mon Basile, afin que cela se passe plus en douceur pour lui. Je ne vois pas grand chose, je n'y connais rien. Pourtant, toutes les taches noires que je vois sur ses reins sont bien nettes. C'est moche. Les reins en sont pleins. On pourrait faire une biopsie, mais c'est inutile. En plus, ça fait très mal. Une biopsie permet de savoir. Nous, on sait déjà. Basile va sortir et on fera au mieux pour qu'il tienne le plus longtemps possible. Il faut savourer chaque moment, chaque instant, car il est en sursis. Les bilans sanguins sont désormais inutiles. Les taux ne baisseront plus. Retour dans sa cage pour bénéficier encore une journée et une nuit de la perfusion. Basile sort le lendemain.
Nous rentrons à la maison, côte à côte, comme d'habitude. Basile a sauté sur son siège. Il sait qu'il rentre. Il me regarde. Son regard n'est plus vraiment le même, il est fatigué, mais sa fierté est intacte. La mienne aussi. Nous allons rentrer à la maison et c'est bien là l'essentiel, notre essentiel. Retour à la maison, Basile ignore un peu ses copains, il a autre chose en tête. Il fait le tour de la maison, puis du jardin. Il inspecte tout. Il regarde si tout est bien en place. Il vérifie tout. Rien n'a changé. Il rentre et va se coucher sur mon lit, il est épuisé. Il va dormir 14 heures d'affilées.
Les jours qui suivent sont comme le temps : gris. Basile est différent physiquement. L'appétit n'est plus là. Il mange, il ne mange pas. Il va mieux, il est fatigué. Je fais appel à Clic-Animaux, merveilleuse création sur Internet : une société qui aide les associations. Les frais vétérinaires ont été très importants et ma petite Association a besoin d'aide pour les régler. Début décembre, Clic-Animaux publie un appel aux dons, sous la forme « d'une dernière lettre au Père Noël », celle de Basile. Je m'effondre en larmes à la lecture des premières lignes (et encore maintenant)... c'est extrêmement touchant. C'est percutant. Ça me percute et je ne peux tout lire. Je fonds en larmes, je n'arrive pas à me calmer. J'attends d'aller mieux pour reprendre la lecture de cette lettre. La lettre d'un condamné à mort à brève échéance. Cette lettre, cet appel aux dons, va avoir un effet retentissant. Les dons arrivent, les lettres de soutien aussi, les mails et même des coups de téléphone, de ceux qui « ont osé» m'appeler pour me soutenir de vive voix. C'est impressionnant, le nombre personnes touchées par l'histoire de Basile. Je lis tous ces textes de personnes qui ne me connaissent même pas, qui ne nous connaissent même pas. C'est poignant, inoubliable. Je n'arrête pas de pleurer en lisant tous ces témoignages d'amitié, d'amour même, ça me touche profondément.
Des personnes, spécialistes en Reiki me contactent et me proposent leur aide. L'une d'elle « m'attire » davantage. Cette personne c'est Anne. Elle va devenir mon amie, notre amie à Basile et à moi. Nous étions un Duo, nous devenons un Trio. Nous sommes indissociables. Nous ne faisons qu'un. Nous sommes unis par le cœur et par l'esprit. Nous avons un but commun : faire que Basile reste vivant le plus longtemps possible. Tous les jours, des SMS, un coup de fil, un appel au secours... Anne est toujours là, disponible pour nous, le jour, la nuit. Elle habite loin, à Quimper, mais c'est comme si elle était là, tout près de nous. On ne l'a jamais vue, mais, aucune importance, elle fait partie de nous et c'est comme si nous la connaissions depuis toujours, pas physiquement, d'une façon qui ne se touche pas, d'une façon qui se sent et se ressent.
On va, tous les trois, tenir le coup pendant trois mois.
Pendant ces trois mois, Basile s'affaiblit. Pire, il a des syncopes. Dès qu'il s'excite un peu, même un tout petit peu, il tombe. Après quelques instants pendant lesquels il se demande ce qui vient de lui arriver, il repart. Ses organes sont touchés : les reins, et maintenant, le cœur... Son regard change, il devient triste, très triste. Il devient difficile pour moi de le regarder. De plonger mon regard dans le sien. Ce que j'y vois ne me plait pas. Pas du tout. Il mange en pointillés, un coup oui, un coup non. Il crache un peu parfois, des petits vomis. Je lui donne des médicaments pour la nausée en plus de tous les médicaments qu'il a pour ses reins. Quand il ne mange pas, c'est l'angoisse. J'envoie un SMS à Anne. Elle lui fait un soin à distance. Souvent, ça fonctionne. Il remange. Je revis.
Basile arrive ainsi au 28 mars 2013, jour de ses 2 ans. Nous faisons des photos pour toutes ces personnes qui le suivent et pour celles qui nous aident, moralement et financièrement. Certaines, sans le connaître, sont très proches de Lui. Basile a une Aura, les responsables de Clic-Animaux me le disent et c'est vrai. Tous ceux qui le connaissent un peu, l'aiment. Cet anniversaire, même s'il constitue une victoire, la nôtre, est triste car Basile ne va pas bien du tout. Il a un visage terriblement triste. J'ai mal à l'âme.
Deux jours après, le 30 mars 2013, il neige. Basile et Garou sont, côte à côte au bord de la terrasse, ils regardent le jardin. Basile est tremblotant. J'enlève ma chapka et je la lui mets sur la tête. Il apprécie. Il est beau, je le prends en photo. C'est la dernière. Je ne le sais pas encore.
Vers 18h00, je prépare leur repas. Basile n'a pas faim. Je m'angoisse comme chaque fois. J'essayerai à nouveau un peu plus tard. Il est 21h00, Basile ne veut toujours pas manger. J'essaye de me détendre devant la télé. Il ne se couche pas. Il est agité. Il vomit un peu. Il a la nausée. Il fait quelque chose qu'il n'a jamais fait : il rase les murs et ne se couche toujours pas. J'appelle la clinique vétérinaire. Une chance que, ce samedi soir, ce soit la nôtre qui soit de garde. Une chance sur trois. Nous arrivons à la clinique vétérinaire. Basile est calme. Il s'assoit tranquillement. La véto l'ausculte. Le cœur de Basile est dans un état catastrophique. La véto lui fait une injection d'un anti-vomitif et nauséeux et nous rentrons à la maison. Arrivé à la maison. Basile recommence. Il tourne dans la pièce. Il est minuit passé, je n'en peux plus d'essayer de le calmer. J'appelle Anne, je lui explique ce qui se passe. Elle lui fait un soin. Je me couche pour voir si il va venir se mettre à côté de moi, j'essaye de l'allonger, il se relève. Je me relève. Je retourne m'asseoir sur le canapé. 4h00 du matin, Basile est toujours agité. La piqûre de la véto n'a pas eu beaucoup d'effet. Le mal est plus important que cela.
Basile rase les murs et, là, tout d'un coup, il se campe au milieu de la pièce, bien droit, il me regarde droit dans les yeux et il m'aboie dessus, il m'aboie dessus, d'un aboiement volontaire. Il me demande quelque chose.
Je comprends. Je comprends trop bien.
Je rappelle la véto, j'installe tous mes chiens dans des pièces séparées avec la télé et la radio et nous partons à la clinique vétérinaire. Basile saute dans la voiture et s'assoit calmement. Je suis dans un état second. L'angoisse me gagne. Il fait nuit noire. Je le regarde. Il semble déterminé. Ça m'angoisse encore plus. Nous arrivons à la clinique vétérinaire. Basile se calme comme la première fois. Il s'assoit tranquillement. Il est presque content. C'est ce qu'il voulait. Revenir à la clinique. La véto s'absente de la pièce. Je regarde Basile, il se couche. Ça fait des heures qu'il tourne à la maison et, là, il se couche. Il est serein. C'est là qu'il veut être. C'est incroyable cette façon de me demander d'en finir... La véto revient, elle l'ausculte à nouveau. Le cœur de Basile est dans un état catastrophique. Je lui raconte tout. Là, tout de suite, nous décidons de mettre Basile sous perfusion et elle m'appellera vers 10h30. Elle s'éloigne avec Basile qui suit, docilement...
Je rentre, il est 5h00 passé... Je m'active dans la maison, pas question de me coucher. Je suis aussi agitée que Basile l'était tout à l'heure. Je le sens dans sa cage, apaisé par la perfusion de morphine. Je réfléchis. La décision est tellement dure à prendre. J'appelle Anne, nous discutons. Je réfléchis à nouveau. Je sais que Basile souffre. Il a de plus en plus de syncopes. Il veut en finir, je le sais, je le sens, je le vois. Je dois faire ce qu'il me demande. Il ne faut pas qu'il meure dans une cage de vétérinaire, seul. Ma décision est prise. Il est 10h00, je ne tiens plus en place, j'appelle la véto, je rediscute avec elle. Je lui dis que Basile est au bout du rouleau et qu'il veut en finir. C'est ce qu'il m'a dit en m'aboyant dessus de toutes les pauvres forces qui lui restent. Il m'a dit en clair : « Mais qu'est-ce que tu attends ? » La véto acquiesce et me confirme qu'il souffre et que son cœur ne va plus tenir longtemps. Je lui fais part de ma décision d'endormir Basile. Elle me dit que c'est sage. Qu'il n'y a malheureusement plus rien à faire d'autre mais qu'elle voulait que la décision vienne de moi. Elle me dit qu'elle a dû lui administrer à nouveau de la morphine car il recommençait à être très agité, c'est-à-dire à souffrir. Elle me donne rendez-vous à midi.
J'appelle une amie en lui demandant de venir garder ma tribu. A ma voix, elle me dit aussitôt oui et arrive une heure après. Je suis dans un état…. Crevée et survoltée en même temps. Je suis révolutionnée de l'intérieur. Je fonce à la clinique. La véto m'accueille. Le climat est tendu et l'émotion palpable. Elle va chercher Basile. Je le vois encore se diriger vers moi du fond du couloir, il tremble de partout, il marche lentement, il me regarde, ses yeux ne quittent pas les miens, il remue sa queue. Il est content de me voir. J'ai amené une couverture, Basile se couche dessus. Je m'assois à côté de lui. Je pose sa tête dans le creux de ma main gauche et je lui caresse le flanc de ma main droite. Il me regarde. Il est serein. La véto me dit de prendre autant de temps que je veux, qu'elle passera nous voir de temps en temps pour lui administrer de la morphine afin qu'il ne souffre pas. Elle a compris le lien qui me lie à Basile et elle le respecte.
Nous sommes en tête à tête, je le regarde, il est beau, plus beau que jamais, plus beau que toujours. Je lui parle. Je lui parle de nous, de ce que l'on a vécu, de ce qu'il m'a apporté, de comment il a changé ma vie, de ce qu'il représente pour moi, mais aussi pour d'autres personnes, pour L'Homme et son Chien, l'Association qu'il a fait grandir, de moi, qu'il a fait grandir... pas aujourd'hui... aujourd'hui, je me sens toute petite, si petite. J'échange des SMS avec Anne, elle déjeune avec Christophe chez ses beaux-parents mais elle est là, elle est avec nous. Basile somnole de temps en temps, s'agite à nouveau par moment, la véto lui injecte un peu de morphine, il se calme, il ne souffre plus, il est serein. Je lui parle à nouveau, je lui fais des promesses, je lui dis que je vais m'accrocher, que je vais continuer ma mission et, qu'après, nous nous retrouverons.
Il est 16h00. 16h00, le 31 mars 2013, dimanche de Pâques, Basile s'est envolé rejoindre ses semblables : les Anges. Au moment où il s'est endormi dans mes bras, une grosse boule est venue se loger à l'intérieur de moi, je l'ai sentie physiquement, une boule d'énergie, la sienne. Elle est là, toujours au même endroit.
Je sors de la clinique, éblouie par un soleil radieux, hier il faisait gris et il neigeait. Je suis sonnée. Je suis dans un état second. J'appelle Anne et je rentre. La maison est vide et pleine à la fois. Elle est pleine de lui. Il est partout.
Je disais, au début de mon texte, que ma vie allait changer avec l'arrivée de Basile. En effet, une chose est sûre. Je peux dire qu'il y a eu dans ma vie un «avant Basile » et un « après Basile » Ma vie avait un sens avant : sauver des animaux en détresse. Maintenant, ma vie a toujours le même sens, mais Basile a donné une nouvelle dimension à L'Homme et son Chien. A L'Homme et son Chien - La Bande à Basile, c'est le moins que je puisse faire pour Lui qui m'a tant apporté.
Maintenant, en plus du sens donné à ma vie, qui s'est renforcé, ma mort a aussi un sens : un jour, je vais retrouver Basile, mon ami, mon Essentiel, mon Essence-Ciel.
Toi qui fus de ma chair la conscience sensible
Toi que j'aime à jamais toi qui m'as inventé
Tu ne supportais pas l'oppression ni l'injure
Tu chantais en rêvant le bonheur sur la terre
Tu rêvais d'être libre et je te continue.
Paul Eluard (Dit De la Force et de l'Amour)
Pour Toi, Mon Basile...
Comment te dire ?
Comment te dire combien je t’aime ?
Comment te dire ? Les mots n’existent pas
Comment te dire, toi ma Lumière ?
L’Amour ne s’éteint pas !
Comment te dire qu’au fond de moi ?
Il n’y a que Toi !
Comment te dire mon désarroi ?
Toi qui est mon Roi !
Moi, je suis ta Reine,
Celle de tant de peine...
Mais cette peine je la recycle,
Moi j’en fais de l’Amour !
De l’Amour, de l’Amour,
Et encore de l’Amour,
Et j'attends, impatiemment,
De te revoir un jour !
Alors,
Alors je t’emmènerai dans un grand tourbillon,
Je t’aimerai comme jamais, je t’aimerai pour toujours,
Je t’aimerai comme un Roi, je t’aimerai au-delà !
Mais comment te le dire ? Les mots n’existent pas !
Dominique de L'Homme et son Chien - La Bande à Basile
BASILE
Un Amour ne se raconte pas, il se voit, il rayonne, il illumine, il éblouit !
A Mon Basile, le Grand Amour de ma vie, cet hommage, ce beau cadeau que m'a fait Laureen Delannoy, l'adoptante de Jack et bientôt Blue, une belle rencontre, une rencontre vraie. Ceux qui aiment profondément les animaux, d'un amour sans faille, même sans se connaître, se reconnaissent... l'amitié est tout aussi profonde et immédiate.
2 ans, 730 jours que Mon Basile est "au-dessus" de moi, mais aussi en moi, dans chaque millimètre cube de cette maison qui est la sienne, dans l'air que l'on respire dans le jardin, dans le ciel dans lequel brille une étoile qui me fait des clins d'oeil chaque fois que je la regarde.
730 jours tellement pleins, tellement denses, tellement lourds... que je plie parfois sous le poids, que je vacille, et puis... je me souviens de MA promesse, faite le 31 mars 2013, dimanche de Pâques, et je me relève et je continue... pour Lui, Mon Basile, pour tous ses frères d'infortunes, abandonnés, jetés, massacrés, torturés, victimes de nombreux humains dont la barbarie dépasse l'entendement.
Ce combat durera jusqu'à mon dernier souffle, Mon Basile à mes côtés, comme toujours, nous allons continuer pour que notre Amour
rayonne dans les yeux et dans le coeur des chiens qui croiseront notre route et, quand mon heure viendra de le rejoindre, ce sera : le
plus beau jour de ma vie !
Merci à Laureen pour ce bel hommage, à Anne qui fait partie de notre vie à tout jamais, au docteur Leroux de notre chère Clinique du Sycomore à Epernon, qui a toute ma reconnaissance. Merci à tous ceux qui aiment Basile, qui aiment La Bande à Basile - L'Homme et son Chien, qui la soutiennent, qui participent aux sauvetages financièrement, merci à mes quelques familles d'accueil, j'en ai très peu, mais elles sont très fiables, merci aux quelques personnes qui sont à nos côtés et, merci à Toi Mon Basile qui me donne la force de continuer ce combat difficile, éprouvant, ingrat et dont la seule récompense est le bonheur de quelques chiens !
Pour Toi et, avec Toi, je n'ai pas fini de continuer !